Environnement

Comment le port de Rotterdam adapte-t-il sa logistique à la montée des eaux ?

16 janv. 2024
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Parmi les nombreuses conséquences du réchauffement climatique, il en est une qui pourrait impacter plus fortement la logistique que les autres : la montée des eaux. Aux Pays-Bas, le port de Rotterdam travaille sa résilience face à l’inéluctable et est devenu au fil des siècles une référence mondiale en la matière. 

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Le Maeslantkering à Rotterdam

« Vivre avec l’eau plutôt que la combattre », recommandait Eveline Bronsdijk, conseillère de la ville de Rotterdam en développement urbain, au micro de France Inter en novembre 2019. Avec la montée des eaux liée au réchauffement climatique, cette préoccupation de la gestion de l’eau devient celle d’un nombre croissant de personnes dans le monde, et notamment des acteurs de la logistique, qui pourraient en être fortement impactés. Selon l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), le transport maritime représente en effet 80 % du commerce mondial en volume. En tant que 1er port d’Europe, et faisant partie d’un pays dont le quart est situé 6 mètres en dessous du niveau de la mer, Rotterdam a depuis longtemps appris à gérer l’eau, par des digues, des canaux, des polders ou en encore des vagues de dunes... Mais la ville continue de chercher de nouvelles solutions face à une situation qui ne risque pas de s’améliorer. 

 

Des barrières automatisées pour se protéger de la mer 

D’ici à 2100, le niveau de la mer pourrait s’élever de 1 mètre à 1,50 mètre, selon une étude publiée en 2017 par des chercheurs de l’Université d’Utrecht. « Les délégations internationales se succèdent aux Pays-Bas pour apprendre du pays qui a conquis un tiers de son territoire sur la mer du Nord, souligne un reportage diffusé sur France Inter en 2019. Les experts néerlandais sont d’ailleurs appelés en Louisiane, en Indonésie et au Vietnam. Après les typhons, ouragans ou cyclones, ils viennent aider à reconstruire et redessiner les villes, forts de leurs dix siècles d’expérience ». Dans les années 1990, Rotterdam a également construit le Maeslantkering pour se protéger de la montée des eaux et des événements météorologiques violents qui devraient se multiplier dans les prochaines années. Situé à une trentaine de kilomètres du port, ce gigantesque robot de métal se compose de deux immenses barrières, qui se ferment automatiquement en cas de gros orage, afin de maintenir la ville au sec. Durant la saison des orages qui débute le 1er octobre et se termine à la mi-avril, l'ordinateur reçoit de nouvelles informations toutes les dix minutes, 24 heures sur 24. Des données sur la hauteur de l'eau, les prévisions météorologiques de toutes les stations en Europe et il calcule en permanence. Quand il voit que de gros orages s'annoncent et que le coefficient de marée est élevé, il sait que c'est une combinaison dangereuse et déclenche la fermeture. 

Savoir aussi accueillir l’eau 

Mais pour Rotterdam, qui pourrait également voir la menace venir des fleuves qui enflent du fait de la fonte des neiges et des glaciers, il ne s’agit pas seulement de lutter contre l’eau, mais aussi de faire avec. La ville creuse donc des lits, les élargit et crée même de nouveaux bras de rivière. Même démarche pour l’eau de pluie qui se trouve accueillie dans les « Water Plaza » : ces places publiques creuses sont, en période sèche, des jardins d’enfants, des terrains de basket, de skate, et se transforment, en période de déluge en véritable réservoir. La plus grande de ces places peut par exemple contenir jusqu'à un million et demi de litres d'eau. Eveline Bronsdijk parle ainsi de la fonction « éponge » de la ville, avec également des jardins de pluie pour favoriser l’infiltration de l’eau dans les sols, ou des systèmes pour stocker l’eau sur les toits pour retarder le moment où elle sera reversée dans les égouts. Dans chaque projet de rénovation engagé par la ville, une réflexion est menée pour trouver des solutions qui intègre la question de l’eau, qu’il s’agisse de limiter les inondations ou de combattre la sécheresse. 

Partout dans le monde, l’urgence se fait sentir 

Des États-Unis à l’Asie, en passant par l’Europe, tous les pays sentent venir la menace. Par exemple, le Delta du Mékong, au Vietnam, pourrait disparaître sous les eaux dans une centaine d’années si rien n’est fait. En 2021, à l’occasion de la COP 26, Simon Kofe, ministre des Affaires Étrangères des Tuvalu, a marqué les esprits en faisant son discours en costume les pieds dans l’eau, pour alerter sur l’urgence climatique. À Singapour, le gouvernement a créé en 2019 une unité spéciale d’une quarantaine de scientifiques spécialisés pour protéger ses côtes menacées : murs dans les mers, barrières de protection, barrages, écluses pour les marées… le budget climatique de ce petit État est évalué à 70 milliards d’euros pour les 50 à 100 prochaines années. 

Les acteurs de la logistique ont eux aussi leur rôle à jouer lors de la conception des sites et de la mise en place de systèmes innovants de gestion des eaux pluviales… si on leur laisse la possibilité d’endosser cette responsabilité. (cf lien vers l’article de plateformes sur la conférence Afilog sur les eaux pluviales) 

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