Économie

Comment les entrepôts permettent aux investisseurs de conjuguer performance économique et ISR

17 oct. 2022
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Autrefois actif maudit, l’entrepôt est aujourd’hui très recherché par les grands investisseurs en raison des perspectives de rendement qu’il offre tout en leur permettant de respecter leurs engagements ISR. Explications.

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L’entrepôt acquis par AXA IM Alts à Brême en Allemagne ne consommera aucune énergie fossile (©AXA IM Alts)

Les entrepôts logistiques sont devenus, en quelques années, un actif (très) désiré par les investisseurs institutionnels. Surtout quand ils cochent les cases de l’investissement socialement responsable (ISR). Comment expliquer un tel attrait pour cette classe d’actifs qui tient ici sa revanche sur le bureau et le commerce ? « La crise sanitaire, la réorganisation de la supply-chain, la globalisation des échanges et le e-commerce ont participé à la démocratisation de l’immobilier logistique auprès des investisseurs », répond d’emblée Thomas Karmann, Global Head of Logistics chez AXA IM Alts. Pour Ludovic Bernini, Executive Director chez AEW, les entrepôts tricolores sont « plus que jamais synonymes de rendements attractifs » et « génèrent des loyers en constante augmentation ».

En 2021, il s’est loué à l’échelle européenne pour plus de 35 millions de mètres carrés logistiques, contre seulement 12 millions dix ans plus tôt. « À ma connaissance, il n’existe aucune autre classe d’actifs pour laquelle la demande placée à tripler en une décennie, alors même que l’offre n’a pas été multipliée par trois sur le même laps de temps », poursuit Thomas Karmann. Face à une pénurie d’offres de produits – et de fonciers pour de nouveaux développements – couplée à une forte demande des utilisateurs, « l’appétit des investisseurs pour les entrepôts devrait perdurer sur le long terme, en particulier quand ils permettent de respecter les engagements ISR », estime Ludovic Bernini.

Les entrepôts ISR, un incontournable

Chez AEW, flécher des fonds labélisés ISR dans les entrepôts demeure fondamental. « Dans nos comités d’investissement en logistique, le critère ISR est fondamental, appuie Ludovic Bernini. À ce titre, certains investisseurs peuvent refuser des projets d’artificialisation des sols ou des dossiers où il n’est pas possible de réduire les émissions carbones d’un édifice. » AXA IM Alts a également fait ce choix stratégique. « Dans le cadre de l’Accord de Paris, nous ne construisons plus de nouveaux bâtiments sans les critères ISR ou ESG », précise Thomas Karmann.

En outre, le gestionnaire d’actifs alternatifs AXA IM Alts prend en compte la résilience des actifs et des investissements – « par exemple, nous n’édifions pas d’entrepôts sur un terrain submersible ou sur des espaces verts. Nous privilégions le redéveloppement d’anciennes friches industrielles tout en tenant compte de la qualité de la construction et des solutions énergétiques utilisées afin d’avoir un impact immédiat». Sans oublier de projeter le plus en amont possible la réduction de la consommation énergétique des entrepôts. Fin 2021, AXA Logistics Europe Master – fonds, lancé en 2019, qui héberge 133 actifs pour une valeur de 6 Mds€ dans 11 pays européens – a réalisé une première émission d’obligations vertes de 800 M€. « Grâce à ce green bond, nous participons à la décarbonation de notre patrimoine immobilier logistique », abonde Thomas Karmann.

Pourquoi la logistique se prête particulièrement bien à l’ISR

À en croire AEW et AXA Investment Managers Alts, l’entrepôt logistique – plus que toute autre classe d’actifs – présente plusieurs avantages pour respecter leurs engagements ISR. « Contrairement au bureau, commerce et résidentiel, il est plus aisé de transformer une friche industrielle en zone logistique, de déployer à grande échelle des panneaux photovoltaïques sur les toits des bâtiments et de préserver la biodiversité grâce à de grands corridors verts ou la végétalisation de la 5e façade », énumère Ludovic Bernini. Et Thomas Karmann d’ajouter : « Pour les entrepôts mono utilisateur, nous sommes en capacité de réaliser une remise à niveau de l’existant et d’améliorer ainsi la qualité environnemental de l’actif, notamment grâce à l’installation de solutions d’éclairage type LED et de systèmes de chauffage permettant une meilleure efficacité énergétique. »

À Brême en Allemagne, AXA IM Alts porte un projet d’une plateforme neuve de 90 000 mètres carrés qui consommera aucune énergie fossile. « Ce site accueillera la plus grande installation photovoltaïque en toiture jamais construite en Allemagne. Grâce à ce système énergétique, le bâtiment produira davantage d’électricité qu’il n’en consomme. » Outre-Rhin encore, AEW est sur le point de livrer, en lieu et place d’une ancienne friche industrielle du port de Hambourg, un édifice logistique de 120 000 mètres carrés sur deux niveaux. « Cet actif à un impact positif sur le climat : il consomme peu de foncier et sera labélisé BREAAM Excellent», expose Ludovic Bernini. Quid, en France, du nec plus ultra en matière d’entrepôt ISR ? « La plateforme Monoprix à Moissy-Cramayel livrée fin 2021 », répond Ludovic Bernini. Ici, le pure player de la logistique Prologis a agi sur toutes les étapes du cycle de vie du bâtiment – de sa construction à son exploitation – pour neutraliser la totalité de l’empreinte carbone sur une période de 50 ans.

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AEW va livrer, à la place d’une ancienne friche industrielle du port de Hambourg, un entrepôt de 120 000 mètres carrés sur deux niveaux (©AEW)

Demain, uniquement des investissements socialement responsables dans la logistique ?

Et demain, quelles évolutions pour la « valeur ISR » dans les investissements logistiques ? « À l’avenir, cette valeur ISR irriguera chaque investissement réalisé dans les entrepôts, stipule Ludovic Bernini. De facto, tous les bâtiments devront être irréprochables notamment pour respecter les objectifs du décret tertiaire. » « Des investissements sont nécessaires dès aujourd’hui, poursuit Thomas Karmann, pour éviter que ces actifs ne deviennent illiquides. » Pour rappel, le décret tertiaire fixe une diminution de la consommation énergétique du parc tertiaire d’au moins -40 % en 2030 et -60 % en 2050 par rapport à l’année de référence choisie (entre 2010 et 2019).

« Outre ce volet énergétique, il faut être très attentif sur les modes de construction et le bien-être des utilisateurs. Certes, ce dernier point n’est pas une obligation réglementaire, mais il augmente le taux de rétention des locataires et participe à la valeur d’une plateforme », estime le Global Head of Logistics chez AXA IM Alts. Pour son confrère d’AEW, la grande question qui se pose dès aujourd’hui porte sur la mesure réelle des engagements ISR en logistique. « L’objectif zéro carbone n’est pas réalisable, il nous faudra donc compenser avec le net zéro carbone. À ce titre, le label ISR sera-t-il suffisant ? Notre secteur devra se doter de critères ISR renforcés pour mesurer les réels effets positifs sur le climat. » Loin du greenwashing.

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