Exosquelettes dans les entrepôts : alliance entre qualité de vie au travail et efficacité

Des salariés d’un entrepôt équipés d’un exosquelette pour faciliter leurs missions et éviter les maladies professionnelles. Il y a quelques années, l’image se serait apparentée à un film de science-fiction. Aujourd’hui, c’est une réalité quotidienne au sein des unités logistiques de grands groupes comme Airbus et FM Logistic ou d’enseignes comme Décathlon et BUT. Leur point commun ? Ils font partie des clients de Japet. Fondée en 2016, cette société nordiste est spécialisée dans le développement et l'intégration d'exosquelettes pour la santé au travail. Son modèle phare – le Japet.W+ - a ainsi été conçu pour préserver le dos de ses utilisateurs. Il se présente sous la forme d’une ceinture lombaire motorisée qui soutient la colonne vertébrale. Il peut s’adapter à la morphologie de l'utilisateur via une molette intégrée.

Un véritable succès. Depuis son lancement commercial en 2019, Japet double chaque année le nombre d’exosquelettes déployés. En décembre 2023, la société a atteint le cap des 1 000 exemplaires vendus. « Il y a eu un grand changement psychologique chez nos interlocuteurs, explique Anaïs Schoreel, Responsable de l'intégration de produits et des ventes chez Japet. Notre technologie est désormais mieux comprise et acceptée par les dirigeants et leurs équipes. Les travailleurs ne craignent plus de ressembler à Robocop en portant un exosquelette. Au contraire, ils sont désormais ouverts à l'idée d’utiliser une solution qui leur permet d’améliorer leur bien-être au travail. » Selon les concepteurs du Japet.W+ (qui ont travaillé avec les équipes du CHRU de Lille), environ 85% des personnes souffrant d’une pathologie lombaire ressentiraient une réduction significative de leurs douleurs grâce à l'exosquelette français. Un bénéfice crucial alors que les troubles musculosquelettiques touchent de nombreux travailleurs et que la durée de la vie professionnelle s’allonge en raison du report de l'âge de départ à la retraite.

Si l’innovation de Japet s’adresse à une large variété d’activités et de métiers, le secteur de la logistique est évidemment l’un des premiers concernés. L'exosquelette est déjà utilisé dans de nombreux entrepôts - de grande ou de petite taille- afin de soulager des travailleurs exposés à des postes à forte contrainte tels que le levage de charges, les mouvements répétitifs et les postures contraignantes. L’enseigne d’ameublement BUT figure ainsi parmi les utilisateurs emblématiques du Japet W+. Après un premier test mobilisant plusieurs collaborateurs en 2021, le groupe a acquis 5 exosquelettes à la suite du test (8 000 euros pièce) à la start-up nordiste. D’autres magasins comme celui de Saint Paul lès Dax ont passé une autre commande. Objectif : améliorer le quotidien des salariés chargés de la manipulation des canapés, des fauteuils ou de la literie en transit dans ses entrepôts. Un pari qui semble en passe d’être gagné. Dans les entrepôts lyonnais de BUT, seulement 5 accidents du travail ont été enregistrés en 2021, suite au déploiement du Japet.W+ (contre 25 en 2020).

Mieux, la solution équipe désormais les salariés de certains magasins BUT. « Nous avions une problématique de santé pour nos salariés à la réception de marchandises, témoigne Olivier Berniolles, Directeur de Magasin BUT de Saint Paul lès Dax. Souvent, les deux personnes occupant ce poste étaient obligées de faire beaucoup d’efforts pour vider les camions. Les collaborateurs se sont aperçus que les exosquelettes leur permettaient de soulager leur dos lors du port de charge, sans altérer leurs capacités physiques. » Afin de faciliter l’adoption de ce nouvel outil de travail, les équipes de Japet se sont déplacées régulièrement à Saint Paul lès Dax et ont proposé un suivi personnalisé tout au long de la phase d’intégration. Sur le terrain, le déploiement d’exosquelettes nécessite en effet un minutieux travail préalable d’identifications des besoins pour les différents postes de travail. Avec succès si l’on en croit le bilan dressé par Perceval Manche, un des deux collaborateurs équipé par l'exosquelette. « Je suis très satisfait ! J’ai beaucoup moins de douleurs après un effort, après un déchargement de camion, par exemple. Rien à redire, c’est vraiment très bien pour la fatigue musculaire et les douleurs au niveau du dos. »

Fort de tels retours, Japet compte atteindre au minimum 500 exosquelettes vendus en 2024. Sans changer sa recette : un assemblage en France (avec 90% des composants d'origine européenne) et des prix stables. À l’image de la nouvelle version du Japet W+ - sortie en juin 2023 - qui propose une performance supérieure à un tarif équivalent. Pour remplir son carnet de commandes dans les prochains mois, l’entreprise mise sur l’élargissement de sa clientèle actuelle. D’abord en France, où elle souhaite cibler de nouveaux marchés comme le BTP, l’artisanat et la santé. Mais aussi à l’étranger avec un plan de déploiement international qui devrait débuter par les pays voisins de son siège social de Loos (Belgique, Allemagne…). 

Au-delà de son développement commercial, Japet souhaite plus largement affirmer la place de l’humain dans les entreprises et notamment dans les entrepôts. « Nous tenons à rappeler que notre exosquelette accompagne le travail humain, mais ne cherche pas à le remplacer, précise Anaïs Schoreel. Il incarne la complémentarité entre les deux. Nous croyons en l'importance de l'intervention humaine pour animer une entreprise. Les robots ne peuvent pas se substituer au savoir-faire humain. Bien sûr, l'exosquelette n'est pas la solution universelle à tous les problèmes. C’est en revanche une réponse innovante pour améliorer la performance de nombreuses entreprises. » Un entrepôt qui combine des outils d'automatisation et des salariés bien équipés pour préserver leur santé : ce n’est certainement plus de la science-fiction, c’est la nouvelle réalité de la logistique en 2024.