La logistique au cœur de l’ADN
Entre la hausse de la précarité en France et la loi Agec qui oblige les entreprises à donner les produits non alimentaires invendus, l’activité de l’Agence du Don en Nature a fortement augmenté ces dernières années. Pour continuer à assurer sa mission, elle a donc dû renforcer ses équipes supply chain.
« Pour l’Agence du Don en Nature, la logistique est le cœur du réacteur », assure Alexandra Vidal, directrice supply chain de l’ADN. En quelques années seulement, le pôle Supply Chain de l’Agence du Don en Nature (ADN) a doublé. Créée en 2008, cette association s’occupe de récupérer les produits non-alimentaires neufs et invendus par les industriels et les acteurs de la grande distribution, pour les donner à des associations qui agissent au quotidien pour lutter contre la précarité et l’exclusion d’une partie de la population. Chaque année, l’ADN permet la distribution de 10 millions de produits aux plus démunis, en s’appuyant notamment sur 3 entrepôts dédiés, dont un géré en propre, et 3 entrepôts de rétention. Avec ses 25 salariés, soutenus par une quarantaine de bénévoles, elle compte aujourd’hui 1 500 associations partenaires, réparties sur l’ensemble du territoire, soit le double qu’en 2018. Selon les derniers chiffres disponibles de l’Insee, 14 % de la population en France était en situation de privation matérielle et sociale en 2022, une proportion qui atteint son plus haut niveau depuis 2013. « Nous voyons ces dernières années une accélération du dépôt de dossiers, explique Alexandra Vidal. Nous retenons les associations qui ont plus d’un an d’exercice et nous observons leur process mis en place pour accompagner leurs bénéficiaires… Nous regardons également comment elles gèrent leur stock et nous les encourageons la plupart du temps à s’informatiser pour garantir une bonne traçabilité des produits distribués ».
Des dons de toute nature
Pour bénéficier de ces dons, les associations partenaires passent commande sur le site de l’ADN, qui les livrera quelques jours plus tard. « Pour constituer notre catalogue, nous comptons sur des donateurs de différents secteurs d’activité : hygiène et entretien, bien-être, équipements de la maison, produits isolants pour lutter contre la précarité énergétique…, liste la directrice supply chain. Depuis notre création, nous nous sommes diversifiés en fonction de ce que nous identifions comme besoin, et de ce que les entreprises donnent ». Les industries proposent leurs produits au pôle « donateurs » de l’ADN, qui en discute avec le pôle « associations » qui juge si ces produits sont utiles aux bénéficiaires, et enfin avec le pôle « supply chain » qui voit si les volumes peuvent être collectés, acheminés, reconditionnés pour en faire des colis cohérents sur certaines familles de produits comme les vêtements ou les fournitures scolaires, et, enfin, être distribués.
Collaboration avec des entreprises d’insertion et des ESAT
« Les entreprises donatrices peuvent prendre en charge la livraison dans nos entrepôts (d’autant que les frais associés peuvent être inclus dans la valorisation du don - du fait de la loi Antigaspillage pour une Economie Circulaire (Agec) entrée en vigueur en 2022 - ou alors nous allons les chercher », détaille Alexandra Vidal. Les produits sont ensuite regroupés selon leur typologie. « Nous travaillons, d’une part, avec deux ESAT (Etablissement et Service d’Aide par le Travail), l’un situé dans le Loiret, l’autre à côté de nous, à Dourges. Nous nous appuyons d’autre part sur deux entreprises d’insertion, l’une située en région Auvergne-Rhone-Alpes et l’autre non loin de Dourges ». Un mécène permet également à l’Agence de bénéficier gratuitement d’un stock de rétention, correspondant à environ 1 200 emplacements, au moment des opérations d’envergure comme « la rentrée solidaire » ou « le Noël solidaire ». Qu’il s’agisse de reconstitution de palettes, de reconditionnement des produits, ou de « kitting » (constitution de kit), tous les dons sont ensuite expédiés dans l’Entrepôt-Ecole de l’ADN (voir encadré), son hub logistique central, d’où la majorité des flux partent pour livrer les 1 500 associations partenaires, avec l’appui de 4 transporteurs.
Décarbonner le transport
En plus de sa mission sociale et solidaire, l’ADN s’évertue à décarboner le plus possible son activité, en intégrant en 2020 (et en se réengageant en 2024) le programme FRET 21 porté par l’ADEME et l’AUTF, mais aussi en travaillant sur les flux ferroviaires quand c’est possible, notamment vers la région AURA (Auvergne-Rhône-Alpes). « Nous sommes également des militants du ralentissement : nous ne livrons pas du jour pour le lendemain. Nous nous organisons avec les destinataires pour adapter les fréquences de livraisons, afin de mieux remplir les camions et d’en réduire le nombre sur les routes ».
Un entrepôt-école à double mission
Ouvert en février 2020, l’Entrepôt-Ecole de l’Agence du Don en Nature, situé à Dourges, au cœur de la plateforme multimodale Delta 3 sur le campus Euralogistic, a une double mission : gérer les 6 000 commandes qui arrivent sur le catalogue chaque année, mais aussi permettre, tous les ans, à près de 100 apprenants de se familiariser avec la logistique. Sur une zone de 2 100 m², l’ADN accueille des personnes du centre de formation Loginov pour leur stage pratique, dans le cadre de leur formation d’opérateur logisticien polyvalent, titre de niveau IV inscrit au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). La formation prodiguée dans cet entrepôt n’est pas comme les autres, et offre de plus le label « Compagnons de la Logistique® », basé sur le savoir-être.
L’Entrepôt-Ecole de l’Agence du Don en Nature accueille aussi des stagiaires des Apprentis d’Auteuil qui envisagent une reconversion en logistique et souhaitent tester leur motivation en conditions réelles, des étudiants de l’Aftral pour quelques jours de mise en pratique, et depuis peu, des lycéens de la Peupleraie, qui passent leur Bac Pro. Durant leur passage, les apprenants s’aguerrissent à la préparation de commandes, à la réception de marchandises, au stockage, à l’expédition, à l’utilisation des différents outils…
Piloté par deux salariés, l’Entrepôt-Ecole de l’ADN dispose d’un stockage de 3000 palettes et d’une zone de tri de 200 m², de rayonnages et du WMS Générix.