L’inflation fait exploser les coûts de construction des projets logistiques
Comme tous les projets immobiliers, les chantiers d’entrepôts sont impactés par une hausse des coûts de construction. Explications avec Damien Vernier et Bruno Becker, respectivement directeur Business Unit Logistique France et directeur des études chez GSE.
25 % : c’est la hausse relevée par le contractant Global GSE sur les coûts de construction de ses projets logistiques en France, comme en Europe entre avant Covid et aujourd’hui. La principale raison : l’inflation. « Cette inflation avait déjà débuté en 2021, une année qui, pour rappel, fût le meilleur cru à l’investissement jamais enregistré pour cette typologie d’actifs. Grâce à la forte poussée du e-commerce, de nouveaux investisseurs ont semblent-ils (re)découvert ce marché. », rembobine Damien Vernier, directeur commercial pour l’activité logistique de GSE en France. Ajoutez à cela un carnet de commandes d’entrepôts qui n’a cessé d’augmenter post-Covid, la guerre en Ukraine et la rareté des matériaux, et vous obtenez une inflation structurelle. « Nous avons constaté une forte augmentation du prix de nos achats au cours des premier et deuxième trimestres 2022 », appuie Bruno Becker, directeur des études chez GSE.
Forte inflation sur l’acier pour les projets d’entrepôts
Parmi les principaux matériaux impactés par l’inflation dans les projets logistiques, citons l’acier. « Nécessaire pour réaliser plusieurs parties d’un entrepôt très présent dans les fondations, les charpentes, la couverture, le bardage et tous les équipements de quais –, ce matériau a vu son prix à l’achat s’envoler de 30 à 40 % en l’espace de quelques mois », rapporte Bruno Becker. Puis à partir de mi-2022, l’inflation percute de plein fouet les tarifs des isolants et les matériels techniques indispensables dans un entrepôt (chauffage, ventilation, climatisation…). « Une spirale qui s’explique par l’explosion des coûts de l’énergie en Europe », observe Damien Vernier. A contrario, la hausse des prix des lots de finition des bureaux dans une opération logistique reste maîtrisée. Par ricochet, le prix de construction moyen d’un entrepôt prime grimpe de manière ‘‘considérable’’ à 650 €/m2 – contre 400 €/m2 quelques années en arrière. « En parallèle, poursuit Damien Vernier, l’augmentation du coût du foncier – lié à la forte demande en besoin logistique urbaine et le zéro artificialisation nette (ZAN) des sols – contribue aussi à la hausse des prix d’une opération logistique. »
Augmenter les loyers, une nécessité impactant le taux d’effort des clients et chargeurs
Comment les professionnels se sont-ils adaptés à cette nouvelle donne d’inflation longue ? « Dans un marché très fluctuant, les développeurs et les investisseurs ont trouvé la variable d’ajustement : les loyers. Fort heureusement, ils ne sont pas aussi élevés que dans certains pays européens », répond le directeur des études chez GSE.
Cette tendance haussière sur les loyers pratiqués pouvant aussi s’expliquer par un taux de vacance très bas, autour de 5 % avec de grandes disparités en fonction des régions, et un manque accru de l’offre face à la demande. Comme ses confrères de marché, GSE – dont la logistique pèse 80 % de son activité – a mis en place des contrats forfaitaires assortis d’une clause d’actualisation ‘‘bien’’ acceptés par ses clients. « Un procédé déjà utilisé par le passé en période de forte inflation », précise Damien Vernier. Avant d’ajouter : « Si en 2023 l’équation économique sera difficile à résoudre, tous les acteurs d’un projet logistique se sont adaptés à la réalité du marché. » En ce début d’année 2023, les engagements forfaitaires et non actualisables sont à nouveau possibles sur des projets dont les travaux peuvent démarrer à moyen terme. « Des discussions ont été engagées avec nos clients, la plupart d’entre eux ont accepté de participer à l’effort nécessaire pour assurer la survie d’une partie des entreprises de la supply chain », abonde Damien Vernier.
Des décalages à prévoir et une forte demande : l’incertitude devient la nouvelle norme
Autre conséquence de l’inflation sur les projets logistiques : le retard pris sur les calendriers de livraisons et les chantiers à lancer. « Après une période d’attentisme, nous nous attendons à des décalages, stipule Bruno Becker. D’autant plus que les opérations en blanc sont de plus en plus rares. » Si Damien Vernier estime que le contexte pourrait être plus ‘‘serein’’ à la sortie de l’été prochain, selon lui, l’incertitude reste de ‘‘mise’’ sur la flambée des prix des matériaux et le coût des matières premières à l’échelle internationale. « Nul ne sait quand les prix vont stagner ou redescendre. » Des secousses économiques qui ne viennent pourtant pas perturber les besoins en mètres carrés nouveaux. « La demande reste et restera très soutenue du côté des utilisateurs présents les secteurs du e-commerce, de la grande distribution et du hard discount, exprime le directeur commercial de l’activité logistique de GSE dans l’Hexagone. Malgré les difficultés rencontrées pour implanter des projets logistiques neufs partout en France, ces acteurs, dans une logique de pénétration et d’organisation de leurs flux au niveau national, ont besoin de louer de nouvelles plateformes performantes, tant sur le plan technique qu’environnemental. »