La méthode des Hauts-de-France pour accueillir la logistique
Le 28 mars dernier, l’association Afilog publiait une cartographie révélant la forte tension foncière logistique. Alors que cette pénurie logistique s’étend sur le pays, la région des Hauts-de-France se porte bien et annonce même de nouveaux projets... Quelle est sa méthode ? Entretien avec François-Xavier Bieuville, sous-préfet de Dunkerque.
Comment se porte le marché de l’immobilier logistique dans la région des Hauts-de-France ?
François-Xavier Bieuville : De nouveaux projets logistiques continuent de voir le jour, à Somain, Pécquencourt, Dunkerque… (ndlr : selon BNP Real Estate, en 2021, 45 transactions avaient déjà été enregistrées pour plus de 1,2 millions de m² placés) En effet, que cela soit pour accompagner les ambitions maritimes et fluviales de la région ou pour soutenir l’implantation de nouvelles activités économiques, les secteurs du transport et de la logistique, ainsi que de son immobilier, se portent bien. De plus, tous les nouveaux projets se font dans le respect du « zéro artificialisation net » exigé par la loi climat et résilience.
En quoi la région est-elle plus accueillante que d’autres pour la logistique ?
François-Xavier Bieuville : La raison en est double : sa situation géographique et son histoire économique. Sa façade maritime, son réseau fluvial, avec notamment le Canal Seine-Nord, canal à grand gabarit qui reliera Compiègne dans l’Oise à Aubencheul-au-Bac dans le Nord qui verra le jour dans quelques années, ses infrastructures routières (7 autoroutes traversent la région !)... lui confèrent un rôle majeur dans les échanges nationaux et européens en la reliant directement à la Grande-Bretagne et aux pays du Nord de l’Europe. Son passé industriel, avec d’abord les mines de charbon il y a près de 250 ans, puis les fonderies d’acier, les usines automobiles, les activités textile, etc. lui a également donné un esprit entrepreneurial fort. Son bassin d’emploi (ndlr : les Hauts de France se situent à la 3e place pour l’emploi dans la logistique, selon l’Insee) et sa proximité avec le bassin de consommation francilien viennent aussi s’ajouter à la liste de ses avantages.
Dans quelle mesure l’État participe à cette attractivité logistique des Hauts-de-France ? Quelles sont les grandes lignes de la méthode déployée par ses services sur place pour ce faire ?
François-Xavier Bieuville : De tout temps, l’État a accompagné la région dans ses phases de grandes transformations économiques, parfois brutales, comme cela a été le cas avec la fermeture des mines de charbon. Les élus ont compris très tôt l’importance de la logistique et de la dimension sociale qu’elle représentait, avec des emplois accessibles à tous, et des contrats flexibles pouvant s’adapter à différents profils de personnes. Ils se sentent donc impliqués dans les projets. Avec une réserve foncière inscrite dans les plans locaux d’urbanisme, communaux et intercommunaux, l’État favorise le développement de l’activité logistique à travers l’instruction sans complaisance des dossiers, en respectant plusieurs équilibres : un équilibre politique en informant les populations ; un équilibre social, en consultant les organisations syndicales associées, ainsi que les tissus intermédiaires ; un équilibre économique et environnemental. Un bon sous-préfet doit être utile à son territoire, efficace, proche de la population et savoir faire preuve d’autorité. La logistique est ainsi portée par des élus motivés et des services instructeurs exigeants.
Quels sont les prochains grands projets logistiques dans la région ?
François-Xavier Bieuville : Je peux citer le projet de Somain, sur la ZAC de La Renaissance, entre Douai et Valencienne, qui ambitionne de réutiliser la gare de triage pour transformer la zone en un nœud multimodal, avec transbordement direct. Plusieurs milliers de mètres carrés d’entrepôt y sont prévus. Je pense également au nouvel entrepôt de Pecquencourt, situé sur la zone d’activité Barrois, qui sera occupé par le logisticien SDM. Par ailleurs, le projet du Canal Seine-Nord, prévu pour 2030, verra la mise en place de 4 ports intérieurs (Nesle, Péronne, Marquion-Cambrai et Noyon) et sera nécessairement accompagnée par de nouvelles activités logistiques. Le Port de Dunkerque envisage également de continuer son développement et mise pour cela sur de nombreuses nouvelles infrastructures. Enfin, l’annonce de l’implantation prochaine de quatre usines de batteries électriques dans la région laisse penser que de nouveaux entrepôts seront nécessaires dans la région : l’usine d’ACC, le projet le plus avancé, devrait ouvrir ses portes das les prochains mois à Douvrin, dans la banlieue de Lens. Elle sera suivie de l’usine d’AESC-Envision à Douai, puis de celle de Verkor, dont le mises en production sont prévues courant 2025. L’usine de ProLogium est quant à elle encore à l’étude pour une implantation à Dunkerque.